Élevage

Directive sur les émissions industrielles : 8 parlementaires s'opposent à un meilleur encadrement des élevages avicoles et porcins

Personnalités politiques (8)

Question parlementaire

Nationale

Question écrite de Mme GOULET Nathalie Sénatrice (Orne - UC) :

Mme Nathalie Goulet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences de la révision de la directive européenne sur les émissions industrielles (directive IED) sur les élevages familiaux de volailles et de porcs.
L'accord conclu le 28 novembre 2023 par les institutions européennes concernant la révision de la directive IED sur les émissions industrielles prévoit d'étendre le champ d'application à davantage d'installations en productions avicoles et porcines, impliquant de nombreuses contraintes supplémentaires pour les élevages familiaux.
Ainsi, ces élevages devront notamment passer d'un régime de déclaration à un régime d'autorisation imposant aux éleveurs un échangeur-récupérateur de chaleur, un système anti-gaspillage de l'eau, de la brumisation, des couvertures de fosses, des enfouisseurs directs, de la ventilation dynamique, des dalles de béton pour le compostage... autant de contraintes qui affaibliront considérablement les élevages à capitaux familiaux, structures typiquement françaises.
Pourtant, l'élevage a intégré dans son processus de production la réduction des émissions de substances nuisant à la santé humaine et à l'environnement. Ainsi, ses émissions agricoles d'ammoniac et celles de gaz à effet de serre sont en baisse et conformes aux plafonds définis par la directive NEC de 2016 et à la trajectoire de la stratégie nationale bas-carbone.
Il est à craindre que l'effet d'une telle directive soit contre-productif avec une baisse rapide du nombre d'élevages familiaux français au profit de produits étrangers ne respectant pas nos normes sanitaires et environnementales.
Cet accord n'étant pas encore ratifié par le conseil des ministres et par le Parlement européen, elle lui demande s'il entend défendre ces élevages à capitaux familiaux français.

Question de M. CHEVROLLIER Guillaume sénateur (Mayenne - Les Républicains) :

M. Guillaume Chevrollier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences de la future directive sur les émissions industrielles sur le modèle français de l'élevage familial avicole et porcin.
En effet, le projet de directive, conclu le 28 novembre 2023par les États-membres, abaisse fortement les seuils de classement « IED » (industrial emissions directive) des élevages de volailles et de porcs et ajoute de nombreuses contraintes, ce qui risque de déstabiliser profondément les élevages à capitaux familiaux en France. Or, ces dispositions ne s'avèrent pas nécessaires dans la mesure où les émissions agricoles d'ammoniac diminuent et sont conformes aux plafonds définis par la Directive européenne 2016/2284, dite Directive NEC, et où les émissions de gaz à effet de serre diminuent également, conformément à la stratégie nationale pour la biodiversité et le climat. Par ailleurs, les techniques qui devront être mises en place par les éleveurs pour respecter cette directive ne sont pas encore connues. Officiellement, les exploitations concernées devront passer d'un régime de déclaration à un régime d'autorisation. Ce dernier imposera aux éleveurs un certain nombre d'installations très contraignantes et coûteuses à l'échelle d'un élevage familial.
Concrètement, en France, cette directive met en danger plus de deux milles exploitations porcines spécialisées, mille exploitations de volailles spécialisées et six mille exploitations mixtes. Au moment où nous promouvons le circuit court et la consommation locale, l'application d'une telle directive paraît incohérente et contradictoire. Au contraire, la protection des modèles familiaux d'élevage porcin et avicole est essentielle car il est question de notre souveraineté alimentaire.
Aussi, il souhaite connaître la position du Gouvernement au sujet de ce projet de directive et s'il compte défendre le modèle familial de l'élevage français de porcs et de volailles.

Question de M. CANÉVET Michel sénateur (Finistère - UC) :

M. Michel Canévet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les dangers d'une adoption, en l'état, d'une révision de la directive relative aux émissions industrielles (IED).
La Commission européenne a proposé, le 5 avril 2022, un projet de révision de la directive relative aux émissions industrielles (IED) qui s'inscrit dans le cadre du pacte vert, censé faire de l'Union européenne une économie compétitive, neutre en carbone et durable à l'horizon 2050.
Ce projet étend largement le champ d'application pour les élevages de volailles et de porcs en abaissant les seuils de classement « IED ». Si les techniques qui devront être mises en place par les éleveurs pour respecter la directive IED ne sont pas encore connues (règlement d'application à suivre), le projet de directive comporte de nombreuses contraintes supplémentaires qui viendront déstabiliser les élevages à capitaux familiaux en France.
Cette directive n'apparaît pas nécessaire concernant l'élevage familial au regard de l'objectif de réduction des émissions d'ammoniac et de gaz à effet de serre. En effet, à ce jour, la ferme France est dans une trajectoire de respect des objectifs de réduction des émissions. En outre, son application ne permettrait qu'une baisse minime des émissions de gaz à effet de serre (GES) agricoles : moins de 3 %, selon l'étude d'impact de la Commission européenne. Et pourtant, cela représenterait des contraintes supplémentaires pour les éleveurs en augmentant le nombre de normes à respecter et en facilitant l'action de tiers souhaitant contester les projets des éleveurs. Les agriculteurs déplorent d'ailleurs cette suradministration de leurs activités.
Cette directive affaiblirait le modèle français basé sur les élevages à capitaux familiaux, ancré dans les territoires et résilients, au profit des consortiums agro-industriels qui se développent ailleurs en Europe.
Il lui demande la position de la France sur cette révision de la directive IED.

Question de M. ALLIZARD Pascal sénateur (Calvados - Les Républicains) :

M. Pascal Allizard attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire à propos de l'avenir des éleveurs de volailles et de porcs.
Il rappelle les difficultés rencontrées par la filière française de l'élevage de volailles et de porcs, alors que par ailleurs les importations progressent.
Dans ce contexte, les professionnels s'inquiètent du projet de directive européenne sur les émissions industrielles qu'ils estiment inadaptée, complexe et créant de nouvelles distorsions de concurrence.
En créant de nouvelles normes plus contraignantes, cette directive impacterait fortement les éleveurs et, plus globalement, le modèle français d'élevage familial. C'est notamment le cas dans le Calvados.
Par conséquent, au moment où les agriculteurs se mobilisent pour défendre leur profession en danger, il souhaite connaitre les intentions du Gouvernement, en particulier au niveau européen, pour préserver l'élevage familial français de volailles et de porcs.

Question de Mme CUKIERMAN Cécile sénatrice (Loire - CRCE-K) :

Mme Cécile Cukierman attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les conséquences dramatiques qu'aurait l'adoption définitive de la Directive européenne sur les émissions industrielles sur la filière porcine.
Après un an et demi de négociations, les ministres et députés européens ont trouvé un accord sur ce projet de directive qui étend fortement le champ d'application pour les élevages de porcs en abaissant les seuils de classement des émissions industrielles ou « IED ».
S'il est aujourd'hui démontré que voter cette directive aurait une efficacité marginale au regard de son objectif affiché, cela ne permettra qu'une baisse minime des émissions de gaz à effet de serre (GES) agricoles : moins de 3 %, selon la Commission européenne elle-même dans son étude d'impact.
A contrario de protéger la filière, cette directive engagera la souveraineté alimentaire de la France pour au moins les 20 prochaines années, dans un contexte où l'autosuffisance de la France dans les principaux produits animaux n'est plus assurée.
Aussi, il ne faudrait pas fragiliser une filière qui connait des difficultés de renouvellement des générations, en ajoutant des contraintes disproportionnées et inadaptées à l'élevage.
Enfin, cette directive ajoutera une complexification administrative sans précédent, en complète contradiction avec les objectifs de simplification annoncés par l'État et attendus sur le terrain.
Compte tenu de ces éléments, elle souhaite savoir si le Gouvernement entend exclure l'élevage du champ de la révision de la Directive IED afin de préserver la souveraineté alimentaire de la France dans un contexte où l'autosuffisance de la France dans les principaux produits animaux n'est plus assurée.

Question écrite de Mme PLUCHET Kristina sénatrice (Eure - Les Républicains) :

Mme Kristina Pluchet interroge M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur ses perspectives de soutien à la filière avicole française dans un contexte européen normatif et commercial très défavorable.
La révision de la directive émissions industrielles (IED) prévoit en effet d'étendre son champ d'application à davantage d'installations en productions avicoles, impliquant de nombreuses contraintes supplémentaires pour les élevages familiaux. L'accord final conclu le 28 novembre 2023 entre le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne fixe des seuils très abaissés (de 40 000 animaux actuellement à moins de 10 000 désormais) et différenciés selon les espèces de volailles, et acte le passage d'un régime de déclaration à un régime contraignant d'autorisation avec enquête publique, autant de contraintes nécessitant des investissements massifs que les élevages à capitaux familiaux, structures typiquement françaises, ne seront pas en mesure de financer alors même qu'ils ne constituent pas des lieux d'élevage intensif. La mise en conformité avec la directive impliquera effectivement la mise en oeuvre des meilleures techniques disponibles pour réduire leur impact sur l'environnement, impact pourtant déjà régulé par l'application de la directive NEC 2016 et la trajectoire de la stratégie nationale bas-carbone. Cet accord augure donc d'une mise en difficulté certaine du modèle français familial d'élevage avicole, qui concerne plus de trois-quarts des exploitations, et ouvre ainsi à terme la porte à des importations massives, ne répondant pas aux mêmes exigences que les élevages français, ni en matière de respect de l'environnement, ni même en matière de qualité sanitaire, situation en totale contradiction avec la volonté affichée du Président de la République de renforcer la souveraineté alimentaire du pays et de sauvegarder les élevages français.
Dans le même temps, le 7 mars 2024, les eurodéputés du comité au commerce international du Parlement européen se sont prononcés en faveur de la prolongation d'une année de l'exonération des droits de douane pour de nombreux produits ukrainiens, dont la volaille, dans les proportions de 2022 et 2023, ce qui correspond peu ou prou à 15 000 à 25 000 tonnes mensuelles. Si le fondement de solidarité avec l'Ukraine n'est pas contesté, ses conséquences assumées par nos seuls agriculteurs, l'absence de clauses-miroirs et la concentration du bénéfice de ces exonérations en matière avicole quasiment exclusivement au profit d'un seul industriel milliardaire, MHP, côté à la bourse de Londres et dont le siège social est à Chypre, interrogent.
Ces deux périls, normatif et commercial, menacent bien directement la pérennité de notre filière avicole. Ces deux décisions n'étant pas définitives au niveau européen, elle lui demande comment il compte défendre, dans ces deux dossiers, la filière française avicole à capitaux familiaux, plus protectrice de l'environnement que les élevages intensifs étrangers, et en cas de vote défavorable, les mesures de soutien qu'il compte déployer pour empêcher sa disparition.

Question écrite de M. BONHOMME François sénateur (Tarn-et-Garonne - Les Républicains-A) :

M. François Bonhomme attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur le projet de révision de la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles (IED) en cours de finalisation au niveau européen. Depuis la proposition initiale de la Commission européenne du 5 mai 2022, les commissions « agriculture et du développement rural » et de l'« environnement » du Parlement européen puis l'ensemble des députés en plénière ont émis des avis différents. Dans un cadre tripartite, un compromis a néanmoins été trouvé le 29 novembre 2023. Or cet accord même consensuel est très préoccupant en particulier pour l'avenir des fermes porcines et avicoles françaises. En effet, s'il semble exclure provisoirement les élevages de bovins, il étend fortement le champ d'application de l'actuelle directive pour les élevages de volailles et de porcs : abaissement des seuils IED à partir desquels les exploitations sont soumises à la directive, introduction d'une règle de cumul des sites. Cet accord, s'il devait être entériné par le Parlement européen en mars 2024, entrainera de nombreuses contraintes et incertitudes pour les exploitations concernées : hausse du coût du suivi administratif, risque accru de non-conformité, renforcement des sanctions administratives, insécurité juridique de l'activité d'élevage, règles de transparence inadaptées pour l'élevage vis-à-vis du public. De nouvelles obligations ne sont pourtant pas nécessaires pour ces types d'élevage puisque leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) sont régulièrement orientées à la baisse en conformité avec la trajectoire fixée par la stratégie nationale bas carbone (SNBC), elle-même cohérente avec le cadre européen. Il en va de même pour les émissions d'ammoniac. Pour un objectif environnemental très faible, l'impact économique de cette réforme s'avèrerait désastreux, avec la quasi-impossibilité pour les exploitations familiales de nombreuses régions d'appliquer les mesures issues de la directive. Par exemple, dans la région Occitanie (3 % de la production porcine française, 3 % de la production d'oeufs, 3 % de la production de volailles de chair), l'investissement pour chaque ferme serait de l'ordre de 80 000 à 100 000 euros, sans tenir compte des charges administratives (montage de dossier, études préalables, etc.). Pour la filière porcine, 123 élevages seraient concernés contre 11 actuellement. Pour les élevages avicoles, 7 élevages de poules pondeuses seraient nouvellement soumis à la directive IED, sans compter les élevages qui auraient à intégrer le seuil IED via la mixité de production avicole et porcine, dont le dénombrement est pour l'heure difficile à estimer. Au-delà de cette région, c'est le modèle familial d'élevage français porcin et avicole ainsi que notre souveraineté alimentaire qui risquent d'être déstabilisés en voulant appliquer des règles initialement conçues pour encadrer l'activité industrielle. Dans la situation actuelle de forte tension que connait l'ensemble des filières agricoles, Il souhaite savoir quelles initiatives le Gouvernement compte prendre pour obtenir a minima de Bruxelles l'abandon de la révision de la future directive IED pour l'ensemble des fermes d'élevage.

Question écrite de M. Michel Guiniot député (Rassemblement National - Oise) :

M. Michel Guiniot alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les dispositions du projet de directive européenne sur les émissions industrielles. En effet, à l'heure où M. le Premier ministre déclare qu'il doit y avoir « une exception agricole française », il apparaît pertinent de rappeler que ce changement de réglementation n'est pas nécessaire dans le cadre de l'élevage en productions porcines et avicoles. La France est dans une trajectoire ambitieuse de réduction des émissions de gaz à effet de serre (-9,9 Mt/an selon le ministère de l'écologie), il ne semble pas pertinent de rajouter des contraintes importantes, purement administratives et procédurières, aux exploitants pour un gain d'effectivité supposé de 3 %, selon l'étude d'impact de la Commission européenne. Les éleveurs et agriculteurs français étant déjà débordés par la charge administrative de leurs exploitations, l'application aux activités agricoles et familiales de mesures conçues pour encadrer l'industrie paraît contre-productive et entraînerait d'autant plus de concurrence déloyale par des pays partenaires, au détriment des Français. Interpellé localement à ce sujet, il souhaite donc savoir quelles dispositions pourraient être engagées pour exclure spécifiquement les élevages de la directive IED, théoriquement rédigée pour l'industrie.

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Crédits

Soumis par Thierry Lherm

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