Droit animal

Pour Laurence Abeille, la proposition de loi déposée pourrait accorder un statut particulier à l’animal, à côté de l’homme et des choses

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Communication officielle

Nationale

La présente proposition de loi reprend l’attente constante de l’opinion publique pour l’ouverture d’un débat public sur le statut juridique accordé à l’animal dans notre pays.
Notre pays qui a élaboré la Charte de la Nature en 1976 où la sensibilité de l’animal est reconnue, compléterait ainsi son dispositif en adoptant un statut particulier à l’animal qui le classe de façon particulière à côté de l’homme et des choses.
Toutefois, il n’est pas dans l’esprit de ce texte de faire de l’animal un sujet de droit.
extraits de l'article sur le site de Laurence Abeille

Intégralité de l'article sur le site de Laurence Abeille :

Statut juridique de l’animal : une conférence de presse pour présenter la proposition de loi

Après plusieurs mois de réflexions et de travaux, le groupe d’études de l’Assemblée nationale sur la protection des animaux, dont Laurence Abeille est Vice-présidente, a déposé une proposition de loi visant « à établir la cohérence des textes en accordant un statut juridique particulier à l’animal ». Une conférence de presse a été organisée mardi 3 juin pour présenter ce texte.

Ce texte a pour objectif de mettre en cohérence le code civil avec les autres pans du droit, notamment le code rural. Il répond à une demande croissante de nos concitoyens et prend en compte la modification du regard que porte notre société sur le vivant « non humain ». Cette proposition acte, par ailleurs, l’évolution des connaissances scientifiques et l’état de la réflexion philosophique. Elle prend en compte la différence biologique entre un être vivant et un objet inanimé.

La présente proposition de loi reprend l’attente constante de l’opinion publique pour l’ouverture d’un débat public sur le statut juridique accordé à l’animal dans notre pays.

Gommer un flagrant déni de notre droit

Depuis les premières domestications de l’animal, l’homme alors chasseur-cueilleur, a partagé son existence en prise à l’hostilité d’une nature alors triomphante, indomptée et capricieuse, avec l’animal. Ce passé ancien, puisque le loup a été domestiqué il y a environ 18 000 ans, le chat et les autres animaux il y a environ 8 à 9 000 ans, à l’évidence a tissé des liens complexes et forts entre homme et animal. D’aucuns préciseront d’ailleurs, en toute rigueur scientifique, que malgré tous nos efforts pour nous extraire de cette condition, nous-mêmes sommes des animaux, certes particuliers de par le pouvoir et la domination que nous avons acquis et exercés sur le reste du règne vivant à la faveur du phénomène d’évolution dont nous avons tiré parti, mais bel et bien incus à l’ordre des mammifères, et donc soumis à la dure réalité et pesanteur des contingences afférant à cet état.

En effet, à travers les siècles bien des pistes de distinction ont été avancées pour nous enorgueillir d’un présupposé « propre de l’homme », intelligence, rire, conscience, faculté d’anticipation, mais au final aucune n’a abouti à une démonstration totalement convaincante et infaillible au regard de l’actualisation des connaissances.

Nous accompagnant dans notre aventure de civilisation, il était normal que l’animal et notre rapport à l’animal soit régi par les règles de vie en société dont on s’est progressivement dotées. Or la primauté a dans ce cadre été donné au rapport de possession, de garde et de maîtrise de l’homme sur l’animal, c’est ainsi qu’historiquement les régimes juridiques ayant le plus d’effet se sont avérés être ceux liés au droit de propriété et consacrés par le droit romain puis par le droit civil jusqu’à s’incarner durablement en France dans le code Napoléon de 1804.

Du seul point de vue du droit il est également insupportable que le droit qui se veut une science sociale en prise avec la société en soit resté à une traduction aveugle et sourde qui s’inscrit en marge et dans la négation de l’accumulation de connaissances. La prise en compte juridique nous apparaît comme fossilisée et archaïque, si les praticiens du droit la trouvent mal appropriée, au quotidien dans leur recours aux seules procédures mises à leur disposition, les théoriciens et la doctrine la pensent erronée et « figiste », en fait l’ère de l’animal ramené à une chose raisonne comme une imposture tolérée pour des raisons pratiques et une certaine facilité mais qu’il convient d’enfin de désavouer, en vertu du principe de réalité.

Une rapide prise en compte de l’examen du droit comparé au niveau international et notamment européen (Suisse, Italie, Autriche…), nous amène au constat que certains États ont déjà entrepris cette actualisation cohérente de leur réglementation, de façon plus ou moins précoce et progressiste, mais reléguant notre droit qui se veut pourtant historiquement comme un modèle rayonnant, au rang des plus rétrogrades et inadaptés du point de vue de la prise en compte de l’animal. Il s’agit ici, après l’abusus, dont le droit pénal a encadré l’exercice avec la législation relative à la sanction des sévices graves et actes de cruauté envers les animaux, d’aménager les deux autres attributs du droit de propriété à savoir, l’usus et le fructus, afin que les droits attachés à la propriété s’exerce d’une façon non-sourde et non-aveugle face à l’évidence du caractère sensible de l’animal qui doit le distinguer, à jamais, des choses inanimées.

Le regard de la société

Au cours de la deuxième partie du siècle dernier les modifications des modes et des habitudes de vie ont entraîné un glissement progressif de la relation que l’homme tisse avec l’animal. Pour ce qui est de celui qui partage sa vie quotidienne, le déplacement des centres démographiques de la campagne à la ville a induit un rapport affectif sous tendu par l’attachement. Qu’il soit chien ou chat, l’animal de compagnie en perdant une partie de ses fonctions utilitaires a pénétré totalement la sphère familiale et il en devenu un partenaire à part entière. L’attente d’une meilleure compréhension du comportement de leur compagnon familier par nos concitoyens pour mieux communiquer avec lui, est un indicateur important de leur investissement émotionnel. Les animaux de compagnie sont, aujourd’hui, intégrés à la vie de leur propriétaire au point d’en suivre toutes les variations familiales, professionnelles et personnelles. L’animal fait partie intégrante de l’intimité des individus.

L’élevage doit aussi tenir compte de l’augmentation de l’attente qualitative des consommateurs en matière de pratiques respectueuses du bien-être et de la bien-traitance des animaux destinés à la consommation. Cette demande en constante progression est aussi justifiée par le besoin exprimé en matière de sécurité alimentaire et de santé humaine. Nos concitoyens, en général, les consommateurs et les éleveurs eux-mêmes, expriment une forte sensibilité sur les techniques de production qui conduisent l’animal dans leurs assiettes.

Par ailleurs les activités sportives ou de loisirs mettant en lice des animaux, celles les associant à des fins thérapeutiques, sociales ou éducatives, de même que la recherche scientifique sont observées, avec attention, par nos concitoyens. Les abus à l’encontre des animaux et plus simplement l’absence de ce que beaucoup considèrent comme la base du respect pour un être vivant, sont largement pris en compte.

La société n’est plus dans son organisation à l’image de celle qui a adopté le statut d’objet pour l’animal lors de l’élaboration du code civil sous l’ère napoléonienne. Elle attend, aujourd’hui, une considération pour l’animal conforme aux modes de vie actuels.

Évolution des connaissances scientifiques

De nombreux champs de la science sont concernés par une approche du vivant sous l’angle de ses capacités cognitives, proprioceptives, neurologiques et éthologiques. Les résultats s’accumulent pour confirmer d’une part la sensibilité nerveuse de l’animal et d’autre part, pour faire état des facultés d’adaptation comportementale à des variations du contexte et des situations. Il en est de même de l’attachement intra et interspécifique. Les animaux, essentiellement pour ce qui a trait aux vertébrés, démontrent des possibilités d’analyse, d’anticipation, d’ajustement comportemental et de mémoire qui sont confirmées par des études internationales multi centrées.

Par ailleurs, pour l’animal de proximité, voici un peu plus de trente ans que les disciplines de la psychologie humaine, de l’éthologie, de la sociologie, de la médecine et des sciences de l’éducation montrent un bénéfice évident pour l’adulte au plan de la santé mentale, physique, du bien–être et de la qualité de vie mais aussi pour l’enfant dans son développement affectif, sensoriel et d’acquisition des compétences socles.

En ce qui concerne les animaux destinés à la consommation et les loisirs, l’éthologie moderne indique la perception du stress, de la souffrance et l’anticipation de la mort dans de nombreuses espèces élevées, chassées ou objets de spectacles.

Depuis René Descartes et son concept de « l’animal machine », la science pointe clairement la particularité de l’animal, marque ses différences avec l’espèce humaine, et la dissocie pleinement d’une vision mécaniste.

La pensée philosophique

Un groupe d’intellectuels de tous les horizons ont récemment manifesté leur volonté de voir prendre en compte la différence entre l’objet et l’animal au travers d’une modification du code civil.

De l’approche biologique à l’identification de la psychologique particulière des animaux, la philosophie a renforcé sa réflexion sur le caractère particulier de l’être animal comme personnalité vivante sensible, sujette aux émotions et dotée d’une sensorialité riche.

Les philosophes fondent aussi leur approche sur les spécificités propres d’un animal par rapport aux autres espèces mais aussi par rapport à l’être humain. Ils considèrent que l’animal n’est pas en déficit de compétences mais plutôt dans un contexte de différences constitutives. Ils reconnaissent même à l’animal des dispositions supérieures à l’homme dans certaines capacités sensorielles et cognitives qui les conduisent à poser le principe de l’altérité animale ; d’où la nécessité de respecter l’Autre dans son intégrité.

De nombreux philosophes avancent sur le terrain de la reconnaissance des particularités de l’animal au motif de notre appartenance au monde du vivant.

Une éthique économique

De multiples activités économiques se sont développées autour de l’animal. L’enjeu du respect de son bien-être et de sa bien-traitance, de son bien-être devient désormais un levier majeur dans l’élevage, le transport, les produits élaborés, les activités sportives et de loisirs ou la commercialisation.

Par ailleurs, de nombreux marchés sont induits ou soutenus par la présence des animaux. Que ce soit l’élevage laitier, l’alimentation préparée pour les animaux de compagnie ou le maintien des espèces chassables ; l’animal en est au cœur.

L’évolution de son statut signifierait une reconnaissance de la nécessité de pratiques respectueuses de son caractère sensible. Elle serait alors un marqueur important pour des démarches économiques éthiques. La problématique soulevée, il est important d’en délimiter l’impact. Loin de l’idée de faire des animaux des sujets de droits, le législateur engagé dans ce projet d’évolution, d’actualisation du droit n’entend pas du tout faire obstacle aux activités économiques ou de loisirs, comme la production animale, la commercialisation, la chasse ou les pratiques sportives. L’enjeu est de doter nos activités d’une éthique adéquate à la réalité scientifique de ce qu’est l’animal et à sa place actuelle aux vues de l’évolution du rapport homme-animal au fil du temps. De même que l’abattage s’est vu progressivement réglementé aux fins non pas d’interdire la mise à mort des animaux mais de garantir le respect du vivant dans les méthodes et les conditions d’abattage, de même il convient de généraliser cette éthique à l’occasion de chaque activité économique s’exerçant sur ou avec l’animal. Ainsi l’extension du caractère sensible à tout animal qui constitue l’objet principal et généra de cette proposition de loi n’est pas antinomique avec la chasse par exemple, ou la pratique d’activités sportives utilisant l’animal, ou le travail des animaux, pour ne citer que celles-ci, mais chaque activité socio-économique devra l’intégrer dans son affirmation, dans ses évolutions tant du point de vue des pratiques et usages que des technologiques mises en œuvre pour leur exercice. Il est aujourd’hui devenu insupportable que des impératifs de rentabilité, de compétitivité puissent s’opposer à la prise en compte du caractère sensible de l’animal, à l’image des impératifs écologiques et prescriptions environnementales qui jadis perçus tels quels, sont aujourd’hui intégrés aux process, aux coûts de productions.

État de l’opinion

La société française, dans une très large majorité, ne comprend pas l’absence de différence entre un objet inanimé et un animal dans le code civil actuel. Les sondages les plus récents expriment une attente forte de voir le droit prend en compte la modification de notre rapport à l’animal mais aussi l’état des connaissances scientifiques. Ce progrès sociétal prend aussi appui sur la réflexion philosophique et la prise de parole publique de nombreux intellectuels.

L’introduction dans le droit pilier que certains qualifient de « Constitution des citoyens » d’un statut spécifique de l’animal, mettrait fin à des dispositions incohérentes et rendrait lisible la qualité propre des autres êtres vivants.

La mise en cohérence du code civil avec les autres droits est l’objectif de cette proposition de loi. Elle inscrirait, par un geste fort, la différence entre un objet et un être vivant non humain dans le droit français.

Notre pays qui a élaboré la Charte de la Nature en 1976 où la sensibilité de l’animal est reconnue, compléterait ainsi son dispositif en adoptant un statut particulier à l’animal qui le classe de façon particulière à côté de l’homme et des choses.

Toutefois, il n’est pas dans l’esprit de ce texte de faire de l’animal un sujet de droit.

L’engagement d’un débat public est un enjeu de société majeur qui s’inscrit dans la réflexion sur notre relation au monde vivant et notre considération à l’égard de l’universalité du vivant.

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Crédits

Soumis par Thierry Lherm

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